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  • Photo du rédacteurSakina Traoré

Et si j'en dis trop, c'est pour qu'on respire ensemble



En écrivant ces mots, je me rends compte qu'il y a plein de sujets sur lesquels j'avais envie de m'exprimer ces derniers temps, sans jamais pouvoir trouver les mots.


Et puis comme toujours, il y a une chanson, un article ou dans le cas d'espèce, un tweet qui me titille assez pour que je puisse enfin écrire ce qui virevoltait dans mon esprit de façon insaisissable.


Je veux parler aujourd'hui des raisons pour lesquelles j'en dis trop (parfois, je vous l'accorde, tout le temps, selon certains).


Les raisons pour lesquelles je raconte des expériences qui m'ont blessée ou qui m'ont laissée avec un gros sentiment de honte.


Les raisons pour lesquelles j'essaie au mieux de me montrer sous "tous mes jours", pas seulement les meilleurs.


Donc je suis tombée sur un tweet qui disant en gros : " y en a ici que je n'ai jamais rencontré mais je sais quasiment tout de leur vie... chaud quand même ".


Je me suis sentie lourdement piquée, lol. Même si je pense que, peu importe à quel point quelqu'un partage... vous ne saurez jamais "quasiment tout d'eux ". Juste ce qu'ils vous montrent, parfois en vous laissant penser que c'est le gros de leurs vies.


Puis en relisant plusieurs fois le post, je me suis rendue compte que son point de vue était légitime et compréhensible. Ce qui n'atténuait en rien la légitimité du mien. Tout est question d'équilibre dans cet univers, j'ai fini par comprendre.


Je suis entièrement d'accord qu'il y a des choses qu'on devrait garder pour nous. Les secrets de famille, les expériences qui ne concernent pas que nous (si par exemple les parents ou les frères et soeurs sont impliqués), les situations intimes, ou encore les situations qui pourraient ternir l'image d'une personne x.


Mais je suis aussi entièrement consciente que notre société carbure à la honte. Pour tout et pour rien, on te sort explicitement ou pas, que tu devrais avoir honte.


Tu devrais avoir honte de ne pas avoir d'enfants à ton âge.

Tu devrais avoir honte de ne pas avoir un boulot.

Tu devrais avoir honte de ne pas être financièrement stable.

Tu devrais avoir honte de ne pas pouvoir gérer la violence de ton conjoint.

Tu devrais avoir honte de ne pas te contenter de ce que tu as, même quand ce sont des miettes.

Tu devrais avoir honte de ne pas être plus organisé.

Tu devrais avoir honte de ne pas être plus accompli.

Tu devrais avoir honte de ... (complétez la liste).


Et aujourd'hui, parler, est devenu mon rempart contre la honte.


J'ai grandi en ne partageant rien du tout. A cause de ma nature d'introvertie et des conditions de mon enfance, je ne parlais presque pas. Je ne donnais jamais mon avis et j'étais toujours perdue dans les méandres de mon esprit, à fuir la réalité.


Si vous, vous avez eu des amis proches, des frères et soeurs... quelqu'un à qui parler au fil des étapes de votre vie, ça n'a pas été le cas pour moi. Encore aujourd'hui, il n'y a personne qui sache tout de moi. Aucun parent, aucune de mes soeurs, aucune de mes amies.


Je donne des bribes d'infos à chacun(e). Il faudrait qu'ils se réunissent pour recouper les informations sur moi et tout savoir de ma personne, mdr. Et même là encore.


Donc. Voilà comment j'ai grandi. Mes parents, mes proches ont essayé mais je n'ai jamais laissé quelqu'un devenir un confident qui sait tout de moi. Je n'ai jamais vraiment donné mes fardeaux à quelqu'un en partageant ce que je vivais et ressentais.


Du coup, j'ai fini par accumuler tellement d'émotions négatives, de question, de manque de confiance en moi et de honte... que je suis tombée dans la dépression et que j'ai failli me laisser tenter par l'automutilation.


Et les mots... les mots m'ont sauvée. Pour ça, je serai à jamais reconnaissante à Bissiriou de m'avoir redonné ma voix dans un des premiers épisodes de Snap en 2018. Je sombrais et il a été l'un des seuls à voir en moi et à me dire " je te comprends, parle, ça te fera du bien et tu aideras quelqu'un, là, dehors ".


J'y suis allée en n'étant pas très convaincue que ça m'aiderait. Encore moins que ça aiderait les autres. Mais il avait raison. Vous ne pouvez pas savoir le nombre de personnes qui ont commenté la vidéo ou sont venues me voir pour me dire " je me reconnais dans tes mots, maintenant je ne me sens plus si seul(e) ".


Et ça, ça m'a aussi libérée. La honte a été retirée de mes épaules parce que j'ai réalisé que je n'étais pas la seule à être plongée dans cette situation. Que je n'étais pas folle, pas ingrate, pas bizarre, pas "unloveable".


Depuis, je pense que je n'ai plus arrêté de partager.


Dans mon podcast, pour que les jeunes dans la vingtaine sachent qu'ils ne sont pas les seuls à traverser certaines situations.


Qu'ils sachent que c'est normal d'être perdu, hésitant, apeuré... et encore une fois, je ne vous dis pas le nombre de personnes qui m'écrivent après avoir écouté certains épisodes pour me dire "merci, grâce à toi je sais que je ne suis plus seul(e) et je peux mettre des mots sur mon mal / ce que je ressens".


A travers ce blog aussi, je partage !


Pardi, je pensais être complètement puérile et superficielle en écrivant mon billet sur mon addiction aux Harlequins (qui en est à 1300 vues en 72h à ce jour). Je pensais que j'allais entacher mon image de jeune féministe, intelligente et rebelle en montrant cette partie de moi à tout le monde, lol.


Et même si je suis sûre que des gens m'ont jugée ainsi en lisant ledit billet, le simple fait d'avoir amenée certaines jeunes femmes à se comprendre et à se reconnaître en moi, me suffit.


Representation matters, les anglophones disent.


Alors je partage. Pour que quelqu'un se reconnaisse en moi. Mais également pour que je me reconnaisse en quelqu'un. Et qu'ensemble, on se débarrasse de la honte qui nous anime face à certaines choses qu'on fait / dit / vit / ressent.


Now, je répète encore que tout n'est pas à partager sur la toile, aux yeux de tous. Chaque personne devrait avoir son jardin secret, son intimité, sa vie privée et idéalement des personnes de confiance à qui parler de ce qui ne peut pas être divulgué.


Je dis juste, que mes limites ne sont pas celles des autres, et ça me va.


Je n'ai aucun souci avec le fait que des inconnus sachent que mes parents sont divorcés, qu'il y avait beaucoup de tension pendant mon enfance, que je ne suis pas proche de ma famille élargie, que j'ai fait mon premier million seulement à 26 ans et qu'il m'a fallu l'appui du Défi Epargne pour ça... je n'ai pas honte de tout ça. Oui, tu sais tout ça sur moi... et alors ?


Si ça diminue ma valeur à tes yeux, j'en suis désolée. Si ça te met mal à l'aise, j'en suis désolée. Je ne dirai pas que je m'en fous, ah non, faut pas se leurrer, je suis encore trop attachée à l'opinion que se font les autres de moi.


Non, je suis désolée. Mais je ne peux pas arrêter. Je ne peux pas arrêter ce qui nous permet à moi et aux autres de nous sentir mieux.


Vous savez, il y a une multitude de choses que j'ai envie de partager mais que je garde pour moi. Que je ne dirai sûrement jamais.


1, parce que ma religion m'enjoint à le faire. 2, parce que l'être humain est méchant, lol. Je ne lui donnerai jamais de quoi me blesser (hence pourquoi j'assume d'abord totalement ce que je veux partager avant de le balancer sur les réseaux).


Donc oui, peut-être que j'en dis trop, à votre goût.


Mais à chaque fois que vous me verrez partager quelque chose qui vous fait bouger d'inconfort dans votre fauteuil, souvenez-vous que je le fais pour mieux respirer, pour que d'autres respirent mieux... et qu'in fine, tout va bien, tant que je ne fais de mal à personne.


Petit additif : J'avais déjà cliqué sur Publier quand Roland Polman est venu me rappeler que si je partage déjà beaucoup depuis quelques années, ma lecture du livre Le pouvoir de la vulnérabilité a empiré la situation, lol.


J'ai dit que les mots étaient mon rempart contre la honte. Mais pour être plus correcte, ce rempart, c'est la vulnérabilité. Je vous ai tout dit dans cet épisode du podcast. Je vous invite à aller l'écouter, vous ne regretterez pas !


Sur ce, bye pour de vrai !


La bise,

Sassy_Sakina.

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