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Il était environ 18h15 quand Tiq est arrivé à la maison. Il avançait lourdement, lentement, ralenti par le poids de l’évènement terrible qui avait eu lieu quelques minutes auparavant.
Il se demandait comment il aborderait la question avec sa mère, comment il annoncerait la nouvelle à sa famille et comment il se dédouanerait de ce forfait…
A peine eût-il franchi le pas de leur maison au coeur de la forêt que sa mère l’apostrophait et lui posait la question fatidique, réduisant à néant ses espoirs de retarder le moment de vérité.
- Ahi, Tiq, où est ton frère ?
- …
Tiq regarda sa mère pendant une fraction de secondes puis baissa à nouveau les yeux. Il ne pourrait jamais lui annoncer ce qui s’était passé en la regardant, au risque d’être hanté par la peine dans ses prunelles, pour le reste de ses jours.
- Tiq ?
- Maman…
Ce n’était qu’un murmure sorti douloureusement de la poitrine du jeune homme mais l’instinct maternel de Dame M. se mit immédiatement en alerte. La panique envahit sa voix :
- Qu’est-ce qui s’est passé ? Où est Mouss ?
- Il…
- Tiq ?
- Je suis désolé maman ! Je n’ai pas pu le protéger, c’est arrivé trop vite !
Les sanglots bruyants de Tiq alertèrent alors toute la maison. Ses frères et soeurs investirent la terrasse en un rien de temps et les entourèrent. Les visages était inquiets, inquisiteurs, perdus…
- Tiq ? appela l’aînée.
- Anie…
- Qu’est-ce qui s’est passé ?
- Je… je suis sorti avec Mouss tout à l’heure. Je sais que maman nous avait dit de rester près de la maison mais il a voulu aller plus loin ! Explorer ! Et… faire sa première piqûre comme un grand
- Oh non… fit Dame M. en se posant sur un tronc d’arbre. Tiq, qu’est-ce que vous avez fait !
- Je… Pardon maman, j’ai vraiment essayé de l’en dissuader mais il a dit qu’il irait seul si je ne l’accompagnais pas ! Donc j’ai embarqué Fel et Mosquy pour qu’on puisse au moins assurer ses arrières mais ça n’a pas suffit
Un silence lourd se fit après ces mots.
Tous étaient plongés dans leurs pensées, imaginant les derniers instants atroces de leur frère. C’était toujours une terrible nouvelle que de perdre quelqu'un comme ça, même si ça arrivait honnêtement très souvent.
- Il voulait te rendre fière maman, ajouta Tiq. Il disait que comme ça, tu lui pardonnerais sa bêtise d’hier
A sa phrase, des larmes de douleur coulèrent sur presque tous les visages. Mouss… le petit Mouss était parti. Et de la pire des façons pour eux.
En effet, les deux frères étaient arrivés dans les toilettes d’une entreprise quelques minutes après 18h. Galvanisé par la présence de son aîné et de ses deux amis, Mouss avait bien vite trouvé sa proie.
Une jeune femme au teint marron placard, avec une peau aussi belle que douce. Il s’était dit qu’elle aurait assurément un goût exquis et avait foncé tête baissée sur elle.
Malheureusement pour lui, la jeune femme n’était pas prête à se laisser faire ce soir-là.
Vigilante à cause des nombreuses attaques déjà reçues les jours précédents, elle avait très rapidement repéré le danger et fait le geste qui s’imposait : elle avait applaudi.
Un clap sec et maîtrisé qui lui avait permis d’écraser le moustique en un clin d’oeil.
Mouss avait ainsi perdu la vie devant Tiq et ses amis. De façon brutale et violente.
Comme cela arrive à des millions de moustiques chaque jour..
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